Échos du WoG : les quêtes héroïques des Malkioni

David Scott a récemment publié quelques réflexions du staff de Moon Design à propos de la nature des quêtes héroïques malkioni.

Les Malkioni ne pratiquent pas les quêtes héroïques à la manière des théistes, mais bien entendu ils interagissent eux aussi avec l’autre monde. Simplement, ils ne font plus de quêtes héroïques expérimentales depuis le fiasco des Apprentis des Dieux.

La quête héroïque malkioni est objective, non subjective. Pour le comprendre, il faut partir des Dialogues de Xeotam: vous n’endossez pas le rôle des divinités, vous êtes en interaction avec eux afin d’imposer votre volonté au monde.

Prenez une quête héroïque, et réduisez-la à ses composantes objectives. Il existe probablement un grand livre de « Rituels ou Sorts Conformes » ou quoi que ce soit d’autre ayant reçu l’approbation des Rokari et qui vous donnera accès à un sort grâce auquel vous pourrez démarrer votre quête à partir d’un endroit donné dans l’Autre Monde. Par exemple, au cours d’une cérémonie dans le Vieux Temple, vous pouvez suivre un chemin qui vous conduit jusqu’à Seshna Likita. Certes vous devez alors vaincre ses gardes et l’affronter, mais en cas de succès, vous pouvez la faire vôtre et ainsi gagner son soutien pour vous et votre lignée.

Les Malkioni rejettent l’idée de servir les dieux. Ils ne les incarnent pas, ils les commandent, comme dans les Dialogues de Xeotam, même si parfois la magie est plus efficace si on donne aux dieux l’impression de les servir tout en les manipulant. [Autrefois les Apprentis des Dieux demandaient à d’autres personnes d’incarner les dieux pour ensuite les abuser et voler leurs pouvoirs (…)]

La sorcellerie des Malkioni est en mesure d’affecter les esprits et la magie théiste, dans la mesure où elle constitue une approche logique et rationnelle de Glorantha. Mais elle est extrêmement risquée, la raison et la logique sont des outils dangereux. Il est quelquefois préférable de ne pas chercher à déconstruire analytiquement – en vue de mieux les manipuler – les grands mystères.

Échos du WoG : à propos du Temps Divin

Jeff Richard a fait récemment un point « canonique » sur la nature du temps divin suite à une question posée sur le WoG.

Q. Les Dara Happiens tiennent un décompte des années depuis avant le meurtre de Yelm. Cela signifie-t-il que, pour eux, le temps existait avant l’Aube?

Jeff – L’empire de Dara Happa décompte le temps à partir de l’Intronisation de Yelm, il y a 112.621 ans. Le calendrier sacré dara happien divise l’année en quatre saisons de dix semaines chacune, plus quatorze jours de Temps Sacré.

Mais le temps tel que nous l’appréhendons dans ces trois formes habituelles (linéaire, cyclique et illusoire) n’existait pas au Temps des Dieux. Les enchaînements linéaires que nous appliquons aux histoires et aux mythes de cette époque résultent du caractère temporel de nos propres existences.

Plentonius rappelle que «dans notre plus vieux poème, composé quelques années seulement après l’ascension d’Antirius, il est écrit que Yelm a régné pendant 100.000 ans». En outre, précise le poème plus loin : «Le temps stellaire est désormais révolu. Mille ans d’obscurité ont passé». Ce poème fut écrit quelques années après l’Aube et devint ainsi la base de tout le système de datation de Dara Happa. Plentonius écrit: «Ces deux propositions, issues des premiers temps de notre ère, sont au fondement de ma propre méthode pour tenter d’ordonner les domaines de la mythologie dans un sens compréhensible».

Q. L’idée selon laquelle le temps n’existe pas sur le plan des Héros a toujours semblé étrange…

Jeff – Du point de vue du canon gloranthien, c’est assez simple. Avant l’Aube, le Temps comme nous l’entendons n’existait pas. Pas de temps linéaire, pas de temps cyclique, pas de temporalité causale. Ce qui régnait, c’était la logique poétique, la rationalité du mythe, pas de la science.

Le Temps Divin est simultané, éternel et sans cesse recommencé. Nous pouvons l’appréhender à travers les cérémonies, les quêtes héroïques et l’exploration mystique – nous pouvons assister au moment où Orlanth forge le Grand Compromis avec les autres dieux, observer l’Aube qui en résulte puis revenir dans notre monde forts de cette expérience. Plus tard au cours de la même année, nous pourrions assister au moment où Ernalda révèle les mystères de la mort, de la renaissance, de la fertilité et de l’abondance, puis revenir dans notre monde forts de cette expérience. Plus tard encore au cours de cette année, nous pourrions assister au moment où furent ordonnées les directions, nommées les premières choses, puis revenir dans notre monde forts de cette expérience.

Dans quel ordre ces événements se sont-ils déroulés? Par définition, l’Aube a eu lieu à la naissance du Temps. Mais nous avons ressenti le miracle de la récolte d’Ernalda APRÈS avoir assisté à l’Aube. Et nous avons ensuite assisté à la Dénomination des Choses premières, qui a forcément eu lieu avant tout le reste – sinon comment ces choses auraient-elles été nommées? Mais cela, nous l’avons expérimenté en dernier.

C’est la clé pour comprendre le Temps Divin – nous pouvons encore en faire l’expérience. Nous ne pouvons pas faire l’expérience du Premier Âge. C’est arrivé. C’est le passé. Mais le Temps Divin est «encore là». Infini. Éternel. Sans cesse reconduit. Nous pouvons y assister, nous pouvons en faire l’expérience, avec une magie puissante nous pouvons même interagir avec lui, mais en tant que créatures du Temps nous ne faisons pas partie de lui.

Les Apprentis des Dieux ont tenté d’apporter de l’ordre et de la causalité dans le Temps Divin, afin de manipuler plus efficacement les forces de l’univers. Mais, comme cela est écrit dans le Guide [de Glorantha] :

«Les Apprentis des Dieux n’ont pas complètement réussi à concevoir une synthèse cohérente ou logique de la mythologie gloranthienne. Dans certains mythes, des dieux voyagent d’un endroit qui existe dans un Âge tardif vers un autre qui n’a existé qu’à une époque antérieure. Par exemple, dans le mythe orlanthi du Voyage vers l’Ouest de Mastakos, le dieu part de Halikiv (qui apparaît pour la première fois pendant la période intermédiaire de l’Âge des Tempêtes) en direction de l’Île Noire (qui a disparu à la fin de la première période de l’Âge des Tempêtes). Ce genre de contradiction exaspérait les Apprentis des Dieux, en particulier le Mouvement Reconstructionniste, et cela fut déterminant dans la mise en place de l’Expérience Zistor, qui chercha à transformer la Création elle-même et à imposer des structures logiques au Cosmos. Néanmoins, ces efforts ont tous échoué en 1010. Le grand sorcier Halwal proclama que ‘le destin des Apprentis des Dieux était scellé depuis le début car le Grand Mystère ne peut être décomposé en segments logiques. Le Mystère précède la Loi et la Raison.’»

Échos du WoG : bovine attitude

Ce petit échange de mails sur le WoG n’est pas seulement amusant: l’air de rien, il apporte aussi quelques précisions intéressantes sur Glorantha, Sartar et « l’esprit du jeu ».

Question:
Je pense que ces questions sont un peu trop dérangeantes pour le nouveau forum (sur le site de MoonDesign) mais comme elles ont émergé au cours de notre partie de ce soir, je les pose ici.
1. La progéniture issue d’un minotaure de la Vallée des Bêtes et d’une humaine peut-elle avoir une apparence humaine?
2. Ce type de reproduction est-il possible sans magie particulière?
3. Si un humain magiquement changé en taureau se reproduit avec une vache, celle-ci donne-t-elle naissance à des veaux normaux?
4. Les Uroxi (adorateurs d’Urox, le Taureau-tempête) ont-ils une affinité particulière avec les taureaux?
5. Peut-on dire des taureaux qu’ils sont affiliés à la «tempête» (rune de l’Air) mais pas à la Terre?

Réponse de Jeff Richard:
Il en faudra plus pour me déranger.
1. Certainement. Ce n’est pas habituel mais cela arrive de temps en temps.
2. Les festivals de fertilité frénétiques pratiqués dans la Vallée des Bêtes fournissent toute la magie, très spéciale, nécessaire.
3. Il n’y a pas de règle établie pour cela.
4. Certains cultes Uroxi ont une affinité particulière avec les taureaux (en particulier au nord-ouest de Péloria et dans Fronéla), à tel point que l’adoration du taureau y est plus importante pour le culte que le combat contre le Chaos. Mais c’est rare dans la Passe du Dragon et dans Prax.
5. Les taureaux sont «Air», les vaches sont «Terre».

Echos du WoG: magie malkioni et système de castes

Posté par Peter Metcalfe en février 2011:

Si les Mages (Wizards) sont tellement formidables, comment se fait-il qu’ils n’exercent pas le pouvoir? (…)

L’explication habituelle, c’est la caste. [Dans la culture malkioni, le pouvoir politique est exercé par la caste des Nobles, les trois autres castes étant les «Commoners», les «Soldiers» et les «Wizards» – NdlR]

Mais rien n’empêche un Mage de tricher avec les règles de la caste quand personne ne regarde. Or, à l’exception d’un unique sorcier du nom de Pilif, aucun Mage n’a jamais réellement violé la loi des castes, même dans les périodes où les insurrections armées et les coups de force se font plus nombreux. Cela m’amène à penser que, pour les Mages, le respect des limites imposées par les castes ne relève pas de la seule vertu.

Je ne crois pas trop à l’idée d’esprits de représailles car cela ne colle pas avec la notion de Mages, qui font leurs petites affaires sans trop se préoccuper des puissances divines. (Un crime de caste peut quand même être détecté par des moyens magiques, mais à mon avis ce n’est pas réellement dissuasif.)

Donc, ce que je pense, c’est que les Malkioni ont intégré la notion de caste dans leurs sortilèges (spells) afin de rendre le système des castes plus efficace. Ainsi un sortilège pour bénir des épées, par exemple, fonctionne comme il faut quand il est lancé sur les épées de membres de la caste des Soldats. Si les Mages servent les Nobles (au lieu d’en faire des maîtres d’hôtel), c’est parce que leur magie administrative ou gouvernementale requiert en grande partie l’autorité d’un Noble pour fonctionner. (…)

Dès lors, qu’est-ce qui empêche un Mage d’inventer un sort déconnecté de tout lien avec une caste? Rien. Ma suggestion, c’est que les sorts «encastés» sont plus efficaces que les sorts «désencastés» (+6 si vous respectez fanatiquement le système des castes comme les Rokari ou les Brithini, +3 si vous avez une approche plus souple comme les gens de Loskalm ou de Safelster).

Echos du WoG : runes inhabituelles

Peter Metcalfe répondait il y a quelques mois aux questions d’un internaute:

Que peut faire un joueur avec les runes de la Loi, de l’Homme et de la Magie?
La rune de l’Homme se rapporte à ce que chacun a en lui. Je suppose qu’on peut l’utiliser pour obtenir des effets surhumains limités, comme frapper plus vite, être plus séduisant, etc. – mais pas pour voler dans les airs, par exemple. Il a été suggéré que la rune de l’Homme se rapportait aussi à la culture, auquel cas on peut l’utiliser pour de la magie sociale – créer une tribu, mettre de l’ordre dans sa communauté en créant de nouveaux statuts hiérarchiques, etc.
La rune de la Magie régule la communication entre les mondes (le monde des dieux, des esprits, etc.). Quelqu’un doté de la rune de la Magie sera plus sensible à sa présence et à ses effets, de même qu’il en aura un usage facilité. On peut aussi l’utiliser pour renforcer ou perturber la magie de quelqu’un d’autre. Plutôt que la cantonner dans le rôle de source d’augmentation pour d’autres capacités, on peut aussi s’en servir pour invoquer la puissance et les capacités des êtres issus des autres mondes ou pour créer des portails conduisant de l’Autre Côté.
La Loi est en général la rune de la Sorcellerie. On peut aussi l’utiliser quand la justice doit être rendue. J’aurai tendance à m’inspirer des procédures légales du monde réel pour avoir une idée de ce qu’on peut faire:
– convoquer un témoin; normalement, celui-ci doit avoir une bonne raison d’être présent mais des mages ou des juristes impressionnants sont capables de le faire apparaître de nulle part dans un nuage de fumée.
– contraindre quelqu’un à garder le silence.
– prononcer un jugement, les parties en présence devant respecter ce jugement – Filez en prison sans passer par la case départ! – ou prendre le risque de déclencher la Colère de Dieu à un niveau égal au jugement transgressé; de plus, un jugement est contraignant même s’il est rendu sur la base de faits incorrects ou malhonnêtement rapportés (…).
– contraindre un fonctionnaire loyal à faire son devoir d’une certaine manière, comme par exemple évaluer le montant des impôts sur votre richesse d’une façon qui vous est favorable; une telle action doit être compatible avec sa fonction, et ne pas entrer en contradiction avec sa fonction.

J’ai lu Le Roi de Sartar ou Sartar: Kingdom of Heroes et je n’ai pas trouvé grand chose sur ces runes.
C’est parce que les Orlanthis n’ont pas de lien très fort avec la rune de l’Homme ou de la Magie. Ils ne sont pas non plus très doués avec la rune de la Loi, utilisée surtout par les Nains et les Malkionis. Je n’ai jamais entendu parler d’une culture ayant une grande affinité avec la rune de l’Homme – certaines cultures la considèrent comme la rune de la nourriture mais ce sont des cultures de mangeurs d’hommes, comme les Morocanths ou le Culte Cannibale. La rune de la Magie, quant à elle, a plutôt été réservée à quelques cultes puissants, sa connaissance n’est pas très répandue.

Echos du WoG : les Orlanthis

Jeff Richard, 24/4/2010:

Si votre campagne met en scène des communautés ordonnées, strictement hiérarchisées, avec plein de fermiers paisibles gouvernés par des élites cultivées, les Orlanthis ne sont définitivement pas faits pour vous. Ils forment un peuple « héroïque », dans la droite ligne des héros de L’Iliade, Beowulf, les Táin Bó Cúailnge ou la Volsunga saga. Ils sont destinés à lutter contre la Destruction du Monde (comme ils l’ont déjà fait lors de la Bataille de l’Unité, les Guerres de Gbaji, contre les Mauvais Empires et, désormais, contre la Déesse Rouge). D’une loyauté absolue envers leur parentèle et leurs serments, respectueux des femmes et de leur magie (n’oubliez pas que les Orlanthis considèrent Ernalda comme l’être magique le plus important de Glorantha), l’idée que les Sartarites se font d’une bonne vie, c’est avoir des terres et des troupeaux qui vous permettent de vous en sortir, vous, vos proches, vos amis et vos partisans, sans avoir besoin de seigneurs que vous n’avez pas choisis.

Echos du WoG

« WoG », c’est la ML « World of Glorantha ». Il s’y dit beaucoup de choses intéressantes, stimulantes, érudites, polémiques ou drôles – ou bien, le plus souvent, un peu tout ça à la fois. Si vous lisez ce blog, c’est peut-être parce que l’anglais constitue pour vous une barrière qui vous détourne de tous ces passionnants débats… Ou bien vous avez décroché de la liste à cause de la masse d’informations échangées. Du coup, comme cela ne demande pas un gros travail, je propose de poster de temps à autre ici même des traductions de certains messages de WoG, ceux pour lesquels j’ai l’autorisation et qui me paraissent utiles / évocateurs / stimulants / etc.

Pour commencer la série, ce post de Jeff Richard (3/5/2011). Il répond à une question sur la nature des Mamelons, un lieu saint des plaines de Prax consacré à la déesse Eiritha, la Mère des Troupeaux des tribus nomades. Jeff décrit ce que représente cet endroit pour quelqu’un d’une culture theyalane, comme par exemple les Héortiens de Sartar :

Voici le point de vue Theyalan: les Mamelons abritent un ancien Temple de la Terre fondé à l’époque où toute cette région s’appelait le Jardin de Génert. Si on s’enfonce assez loin dans les profondeurs du Temple, on peut atteindre Ernalda. Elle arbore un masque barbare [praxien], mais tout initié reconnaîtra aisément Ernalda. Elle se cache ici, protégée par Babeester Gor (qui porte elle aussi un masque barbare). La Fille à la Hache est facile à reconnaître car même les barbares utilisent son véritable nom secret. Le nom qu’ils lui donnent dans leur propre langue sauvage ne présente aucun intérêt, ce qui compte c’est que, comme toujours, la Fille Vengeresse protège sa Mère endormie.